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25 janvier 1999

Quelles retombées touristiques après l'attentat de Louxor?

En 1996 et 1997, le nombre des touristes venant en Egypte variait entre 3 et 3,5 millions par an. Un chiffre qui ne satisfaisait ni le ministère du Tourisme ni les travailleurs dans ce secteur, qui avaient un espoir de voir ce chiffre atteigne les 5 millions de touristes en 1998.

Toutefois, l'attentat terroriste qui a eu lieu Place Tahrir au Caire, puis celui de Louxor ont brisé tout espoir et fortement frappé le secteur du tourisme : Le taux d'occupation des chambres d'hôtel a reculé jusqu'à 0%.. Cela a entraîné la fermeture de nombre d'entreprises touristiques pour des périodes variant entre 6 et 8 mois et le licenciement de leur personnel.41935392

La mission des experts de commercialisation était de revivifier ce secteur qui est en très grosse fragilité, mais la tâche n'est pas du tout facile en raison de la propagande anti-Egypte dont ont bénéficié des pays touristiques voisins concurrents.

Un an après les attentats terroristes et après beaucoup d'efforts, comme l'organisation le festival du tourisme et d'achats l'été dernier, et l'intensification de la participation égyptienne aux salons internationaux du tourisme, la vie a commencé à reprendre dans ce secteur avec des taux "modestes" mais qui donnent l'espoir de voir la situation améliorée à court terme, notamment si l'Etat reste vigilant afin de parvenir à une plus grande stabilité et sécurité.

Une source officielle de l'organisme de promotion du tourisme a qualifié de "prospère" cette amélioration réalisée au cours des derniers mois par rapport à la situation juste après l'attentat de Louxor en novembre 1997. Mais Fakhri Azab, expert en tourisme et PDG de la compagnie "Hayatt Tours of America", n'avait qu'un sourire en entendant ce mot. Il souligne qu'il reflète un "optimisme surréaliste".

Azab dit que cette "prospérité" n'a pas encore été atteinte. "Sans aucun doute, le taux d'occupation dans les hôtels et les villages touristiques a été amélioré dans les derniers mois par rapport à la situation dans les mois suivant l'attentat de Louxor, au cours desquels le taux d'occupation était zéro ou presque", a-t-il précisé. "Mais, il est impossible que le taux d'occupation des hôtels a atteint un chiffre proche de 100%. "Si certains villages touristiques ou hôtels ont vu l'occupation atteindre un tel taux, cela serait du à la réduction des prix. Donc cette situation ne peut pas être considérée comme prospère.

Selon Azab, le taux d'occupation actuel est estimé 28%. Il pense que les fêtes de Noël, du Nouvel an, du Ramadan et d’Aïd al-Fitr vont pousser ce taux jusqu'à 60%.

Azab dénonce les décisions individuelles ou même collectives de réduire les prix des groupes touristiques. Selon lui, ces décisions ont apporté un nouveau type de touristes caractérisé par le revenu limité et la faible dépense. "Le voyage de ce type de touristes est bien calculé en fonction de leur budget vulnérable, ils ne mangent pas aux restaurants, n'utilisent pas les taxis et n'achètent pas de souvenirs", souligne-t-il.41935395

Azab ajoute que l'Egypte n'a rien gagné de cette strategie. Ces prix bas ne couvrent pas le coût réel du voyage. "Pour couvrir ce coût, certaines entreprises touristiques et hôtels recourent à des comportements qui portent atteinte à la réputation touristique de l'Egypte. Ces comportements s'assimilent à du vol. Les entreprises tentent d'imposer des frais supplémentaires comme les frais d'entrée sur les sites touristiques ou de transport sur le touriste, alors que selon les contrats, le prix du voyage inclut l'avion, les transports, le logement et les visites", explique-t-il.

Selon Azab, certains tour-opérateurs font venir des groupes touristiques à perte et réalisent des gains à travers les "boutiques", alors que d'autres sociétés ne payent pas des salaires aux guides touristiques et laissent ces derniers toucher un pourcentage de la part des propriétaires des magasins sur les achats effectués par le groupe touristique qu'ils accompagnent.

Il cite l'exemple des croisières qui s'arrêtent à Alexandrie ou à Port Saïd. Les compagnies touristiques vendent des visites rapides aux touristes de certains sites archéologiques comme les pyramides et la citadelle à seulement 20 dollars par personne, alors que le coût réel d'un tel voyage est entre 30 et 35 dollars. Cette méthode de travail pousse le guide à dire aux touristes "voilà la pyramide de Khéops, la pyramide de khéphren, et celle de  Mykérinos…Et allons aux bazars. Ses explications ne vont plus loin qu'un conte pour enfants", se moque-t-il.

41935400Selon Azab, c'est la réalité du métier de guide touristique en Egypte actuellement. "C'est le problème de toutes les entreprises touristiques qui voulaient trouver des solutions à la crise mais d'une manière fausse", ajoute-t-il.

Et Azab d'ajouter que certaines entreprises ont conclu des contrats avec les propriétaires des bazars. Par exemple, si le groupe touristique achète des produits du bazars à 5000 L.E, l'entreprise prend 4000, le bazar 800 et le guide 200 L.E.

"Le prix dans ces bazars est fortement exagérée", affirme-t-il. "Cela nuit à toutes les entreprises de tourisme qui vendent les voyages à des prix plus élevés. Les touristes les prennent pour des voleurs. Ils ne peuvent pas imaginer qu'il y a ceux qui ont vendu avec perte au début, ce qui cause la perte de crédibilité du marché égyptien".

Azab exige l'intervention du ministère du Tourisme et de la Chambre des entreprises de tourisme et du contrôle des prix pour arrêter la baisse des prix qui détruit l'ensemble du secteur du tourisme.

Il exige également l'existence d'un organisme de réglementation au sein de la Chambre. Cet organisme doit avoir le droit de retirer les permis des sociétés qui recourent aux mauvaises méthodes de travail.

Pour sa part, le PDG de "Pilot Tours" Samir Mohamed Ali souligne que l'objectif de toutes les parties du secteur du tourisme est de réaliser la "prospérité", mais la route est encore longue devant l'Egypte pour y aboutir.

41935402Il précise que la phase actuelle est une phase de transition après les graves répercussions de l'attentat de Louxor sur le mouvement touristique en Egypte. "Les tour-opérateurs ont annulé l'Egypte de la carte du tourisme international et ont déconseillé les touristes de la visiter", a-t-il dit. "Tous les indices montraient que l'Egypte ne serait pas la destination d'un seul touriste pour au moins deux ans et les experts internationaux voyait qu'il n'y a qu'attendre que le marché mondial du tourisme oublie ce qui s'est passé à Louxor".

Selon Mohamed Ali, réaliser un taux d'occupation de 50 à 60% un an après l'attentat Louxor est un succès pour l'organisme de promotion du tourisme et les efforts du ministère du Tourisme, outre les efforts déployés par les patrons des entreprises qui ont initié la commercialisation de leurs voyages sur le marché du tourisme après le retrait des tour-opérateurs du marché égyptien. "Les patrons l'ont fait malgré le coût élevé du marketing individuel et le faible revenu", affirme-t-il.

Mohamed Ali dit que le tourisme en Egypte a connu un nouveau phénomène positif : il n'est plus saisonnier. "L'afflux touristique en Egypte couvre maintenant les quatre saisons : les touristes arabes viennent en été, alors que les Européens et les  Américains viennent en hiver et au printemps", souligne-t-il.

Et Mohamed Ali d'ajouter que les tour-opérateurs ont commencé à retourner vers le marché égyptien, ce qui a été bien remarqué au cours de la période récente, avec les groupes qui ont visité l'Egypte à Noël.

En ce qui concerne la qualité des touristes qui sont venus en Egypte au cours de la crise, Mohamed Ali dit que les parties concernées ont peur que le marché soit lié à ce genre de touristes caractérisés par les très faibles dépenses. "Ils sont au pays grâce à des prix très bas qui atteignent parfois environ 10 dollars par nuit, y compris l'hébergement et le transport", explique-t-il. "Le retour des tour-opérateurs au marché égyptien permettra d'éliminer ce phénomène et d'attirer les touristes qui séjournent dans les hôtels et dépensent sur les achats, ce qui conduira à la prospérité de l'économie et aider les autres secteurs liés indirectement au tourisme d'en profiter.

Selon Mohamed Ali, les touristes qui ont visité l'Egypte après l'attentat de Louxor ont trouvé les hôtels vides, alors ils ont exercé des pressions pour baisser le prix dans les hôtels et les restaurants. "Mais avec l'essor du tourisme, le marché égyptien récupérera son touriste habituel qui appartient à la classe moyenne", affirme-t-il.41935404

Le PDG de "Pilot Tours" prévoit que taux d'occupation atteindra de 60 à 65%. "L'Egypte est capable de surmonter la barrière des quatre millions de touristes en 1999", souligne-t-il.

Quant au rôle de la Chambre égyptienne des entreprises du tourisme, Mohamed Ali affirme que la phase actuelle nécessite l'intensification de la coopération avec la Chambre des antiquités et la Fédération égyptienne du Tourisme. "Il faut également former le personnel qui sera responsable du retour des touristes en Egypte. "Cette formation doit être faite en coordination avec les instituts spécialisés...le niveau actuel des diplômés de ces instituts est faible. Il leur faut davantage d'entraînement pour maîtriser le travail dans le secteur du tourisme.

Pour sa part, le propriétaire du village de "Beach Albatros" Kamel Abou Ali juge que les attentats terroristes visaient à torpiller la prospérité atteint au cours de la période de 1992 à 1996.

Pendant les 6 ou 7 mois qui ont suivi l'attentat de Louxor, les activités ont été complètement arrêtées et les entreprises touristiques n'avaient que recourir aux touristes provenant de la Russie pour surmonter la crise. "Le marché russe était le seul disponible car il souffre de la mafia, et donc ne pas avoir la crainte d'attentats terroristes, au contraire, des touristes en provenance des marchés de l'Europe occidentale et du Japon".41935408

Abou Ali estime que le taux d'occupation atteindra au moins 80% dans les hôtels cette année, mais il craint que l'attaque contre l'Irak et la tension dans la région affecte les capacités de marketing du tourisme égyptien et le nombre des touristes dans la région en général.

Concernant ses idées pour sortir de la crise, Abu Ali a dit qu'il s'était rendu dans les pays exportateurs des touristes à ses propres frais pour signer des contrats avec les agences de voyages pour des groupes touristiques. "J'ai fournis des billets d'avion à prix réduit, en plus j'ai loué des charters avec des bons paquets de programmes pour séduire les touristes", souligne-t-il. "Il n'y avait aucun moyen d'échapper à ces solutions individuelles...L'avenir des centaines de familles, outre l'avenir de l'ensemble de mon projet économique, était mis en danger".

Selon Abou Ali, le tourisme intérieur a compensé, dans une large mesure, les pertes résultant de l'attentat de Louxor, mais le tourisme national n'est pas suffisant en raison du fait que les projets de tourisme en Egypte sont basés sur un concept économique bien clair : à savoir attirer les touristes du monde entier.

Dans son analyse du problème de la baisse des prix qui a prévalu sur le marché égyptien au cours de la période de crise, Abou Ali voit que les attentats terroristes ne sont pas la seule raison de la réduction des prix. "La raison principale est le faible niveau des prix dans les pays voisins qui ont un produit touristique concurrent à l'Egypte", ajoute-t-il. "Dans un pays comme la Tunisie, le prix des groupes touristiques est beaucoup moins cher de celui appliqué en Egypte au moment où son produit touristique est de très bonne qualité..Elle jouit de plages propres non polluées, d'un bon climat, d'un haut niveau de services et d'une grande prise de conscience du tourisme entre les citoyens, en plus que la Tunisie a bénéficié de l'attentat de Louxor car ils n'ont pas d'actes terroristes".

Pour justifier le fait qu'un touriste doit payer plus d'argent pour visiter l'Egypte par rapport aux pays voisins, Abou Ali l'explique par le fait que l'Egypte possède une diversité de produits touristiques, c'est à dire que le touriste visite plus de sites pendant son voyage en Egypte que dans un autre pays. Par exemple, le programme organisé pour le groupe qui vient visiter le Caire inclut, au minimum, les pyramides le musée et la Citadelle. "Ce programme peut aussi inclure le Caire Islamique et le Caire Copte", ajoute-t-il. "Le touriste ne vient pas visiter le Caire seulement, alors il faut ajouter Louxor et Assouan ou bien Hurghada et Sharm el-Sheikh et, par conséquent, le coût de ce programme est plus élevé que les programmes des pays voisins".

Selon Abou Ali, les entreprises touristiques ont bien raison de s'opposer à la politique de baisse des prix suivie par certains. "Quand deux ou trois hôtels réduisent leurs prix les autres ne peuvent que faire de même".

Concernant l'objection de l'existence de deux prix, un pour les Egyptiens et l'autre pour les Etrangers, Abou Ali souligne que la différence entre les deux prix est devenue étroite. "Il y a même des moments où le prix fixé pour les Egyptiens sont plus élevés que ceux des étrangers, comme au cours de Aïd al-Fitr et Aïd al-Adha", précise-t-il. "Les Egyptiens se plaignent à ce sujet". Selon lui, la question est l'objet de l'offre et la demande. "Parfois les hôtels augmentent leurs prix pour limiter la demande car ils ont des contrats à respecter avec les  entreprises de tourisme", dit-il.

Abou Ali juge nécessaire d'intensifier la participation aux "bourses de tourisme", qui constituent une occasion en or pour faire la publicité pour le produit touristique du pays. "Sans publicité, le produit reste local et inexportable", affirme-t-il.

Mais la participation égyptienne aux bourses de tourisme est faible. Elle ne dépasse pas les bourses de "ITB" à Berlin, "BIT" à Milan, "WTM" à Londres, Fitur en Espagne, "ASTA" aux Etats-Unis et récemment "CIS" en Russie. Ces participations sont limitées par rapport au nombre des bourses auxquelles participent les autres pays.

Les experts appellent à l'augmentation de la publicité et la promotion du tourisme à travers l'invitation des journalistes et des médias intéressés par ce domaine. Ils exigent également la nécessité de diversifier le produit touristique égyptien comme le safari, le tourisme curatif, le tourisme des conférences et le tourisme sportif et mettre un calendrier pour ces événements chaque année.

Malgré l'étonnement des observateurs vis-à-vis de le nombre croissant des villages et des installations touristiques et le risque qu'elles soient touchées par une récession en raison du faible taux d'occupation actuel, l'Egypte aura besoin de plus d'un million de lits d'hôtel d'ici l'an 2000 afin de répondre à la hausse attendue du nombre de touristes dans le pays, qui doit atteindre 6 à 7 millions de visiteurs.

Article écrit pour l'édition hebdomadaire du journal économique égyptien "al-Alam al-Youm" (Le Monde aujourd'hui) publiée  le 25 janvier 1999

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