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1 juillet 2013

Égypte : anniversaire sous haute tension

ThawraL'Égypte a été brutalement secouée dimanche par des manifestations monstres contre le président Mohamed Morsi, au pouvoir depuis maintenant un an. La place Tahrir, épicentre de la contestation égyptienne, était pleine à craquer, et les affrontements entre partisans et opposants ont fait au moins 7 morts et près de 600 blessés. Le quartier général du parti des Frères musulmans a également été incendié. Les explications d'Ahmed Hassan, journaliste de la Middle East News Agency pour Radio Canada

 

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30 juin 2013

L’Egypte rouvre ses plaies

Il y a un an, l’islamiste Mohamed Morsi était élu président. Dimanche, ses opposants descendent dans la rue pour demander sa démission. Au risque d’affrontements sanglants

Paniqués à l’idée de voir se profiler une nouvelle vague de violence, les Égyptiens n’en ont pas pour autant oublié leur sens de l’humour. Aux terrasses des cafés du centre-ville du Caire se raconte cette blague : "Un Égyptien rencontre Mohamed Morsi et lui énumère les problèmes actuels du pays : la crise économique, l’effondrement du secteur touristique, la fuite des investissements, le manque d’essence, les pannes d’électricité... 'Et qu’est-ce que je peux faire?', répond le président. 'Démissionner', rétorque l’homme." L’histoire résume le moral des Égyptiens, qui oscille entre détermination et résignation.

Les jeunes laïques à l’origine de la fronde

GraffitiDimanche, c’est jour de mobilisation générale contre le président, à l’occasion du premier anniversaire de son accession au pouvoir. Plusieurs dizaines de milliers de manifestants sont attendus dans les rues du Caire. La capitale vit déjà plongée dans une angoisse similaire à celle précédant un ouragan. La plupart des boutiques ont baissé leurs épais stores en métal, seules les épiceries demeurent ouvertes pour approvisionner des familles qui se ravitaillent comme pour tenir un siège de plusieurs semaines. Les enfants lancent des regards inquiets vers le ciel où tournoient les hélicoptères de la police, qui surveille et photographie les quartiers sensibles où pourrait naître un début d’émeute.

Preuve du climat de tension extrême qui règne à travers l’ensemble du pays, les affrontements entre partisans et adversaires du chef de l’État ont débuté dès vendredi soir à Alexandrie, où trois personnes ont trouvé la mort dont un Américain de 21 ans, enseignant au Centre culturel américain. Il photographiait les locaux du Parti de la liberté et de la justice (Frères musulmans) alors incendiés quand un coup de couteau l’a mortellement atteint à la poitrine. En raison de la tragédie, le département d’État américain a annoncé le rapatriement de certains de ses diplomates en poste en Égypte. Depuis Johannesburg, samedi, Barack Obama a exprimé son "inquiétude" sur la situation.

À l’origine de cette fronde contre Morsi, les jeunes laïques de la campagne Tamarod - littéralement "rébellion" -, qui depuis deux mois parcourent le pays, des couloirs du métro à ceux des entreprises, avec entre les mains une pétition appelant à la démission du président. Ils auraient obtenu 15 millions de signatures (ils en revendiquent 22 millions). "Tout ce qui intéresse Morsi et ses alliées terroristes, c’est de verrouiller le pays pour en faire une dictature qui ne garantira que les intérêts du clan des Frères musulmans, s’indigne Ahmed El-Masry, l’un des instigateurs de la campagne dans le quartier populaire de Shoubra, dans le nord du Caire. Ils nous menacent de mort, veulent supprimer notre liberté d’expression, mais ils n’y arriveront pas." Dans la rue, le jeune homme distribue des cartons rouges où est écrit le mot-slogan de la révolution de 2011 : "Dégage". "Mohamed Morsi veut nous apprendre notre religion, ce n’est pas cela qu’on attend de lui, s’énerve de son côté Saïd Adel, un instituteur à la retraite. Ses discours sont minables, remplis de fautes de grammaire, il n’est pas digne de l’Égypte."

L’armée souffle le chaud et le froid

Face à cette offensive, les partisans du président ont contre-attaqué avec la pétition appelée Tagarod ("impartialité"), qui aurait collecté 11 millions de signatures. Ahmed Hosni, un ingénieur islamiste détenu pendant dix ans dans les geôles sous Moubarak, aborde l’échéance de dimanche confiant, déroulant la rhétorique des Frères musulmans : "Les Égyptiens ont élu Morsi démocratiquement. Or notre Constitution stipule qu’il a un mandat de quatre ans. Demander sa démission va à l’encontre de la démocratie." Lui et ses pairs manifesteront devant la mosquée Rabia Al-Adawiya, dans le quartier de Medinet Nasr, à quelques jets de pierre du palais présidentiel, où les adversaires de Morsi ont prévu de se retrouver.

Alors que l’affrontement s’annonce inévitable, le sort du pays repose dans les mains de l’armée, qui souffle dans ses déclarations le chaud et le froid. Le général Abdel Fattah Al-Sissi, ministre de la Défense, a annoncé la semaine passée que les militaires agiraient pour "protéger la volonté du peuple". Un message de soutien aux contestataires, croit comprendre une partie de l’opposition, qui rêve de leur retour au pouvoir pour mettre fin à l’instabilité politique. Et les Égyptiens d’inventer cette nouvelle blague : "Soldats, si vous intervenez de nouveau, cette fois-ci venez avec des avions, on s’est déjà pris en photo avec vos chars."

 

Article écrit avec Marion Touboul pour le Journal de Dimanche, le 30 juin 2013

29 juin 2013

La tension monte en Egypte à la veille du premier anniversaire de l'accession au pouvoir de Mohamed Morsi

Une grande journée de manifestation est prévue. Des Egyptiens ont lancé une pétition pour demander la démission du président Morsi. Reportage de Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami pour la RTS

11 mai 2013

Égypte : deux ans après la révolution, le pays s'enfonce dans la crise économique

Alors que les investisseurs fuient le pays, l'aide financière du Fonds monétaire international semble loin d'être acquise. Reportage de Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami pour la RTS.

19 avril 2013

Les musulmans contre les frères musulmans

En Egypte, le président Mohamed Morsi est dans une situation critique. Il perd chaque jour des électeurs à cause de la crise économique qui ronge le pays en raison notamment de l'effondrement du secteur du tourisme. Même au sein de la prestigieuse institution d'Al Azhar, symbole de l'islam sunnite à travers le monde, on hausse le ton contre les Frères musulmans. Certains des imams sortis de l'université d'Al Azhar osent critiquer haut et fort le président, issu des frères musulmans. Un reportage de Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami.

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24 mars 2013

Juifs d'Egypte : un sujet tabou

Depuis quelques semaines, le documentaire ''Jews of Egypt'' (''Juifs d'Egypte''), réalisé par Amir Ramses, défraie la chronique. Si sa projection en avant première, l'automne dernier, a été un succès, sa sortie officielle en salle, mercredi 27 mars, fait déjà débat, car le film a bien failli être interdit par les autorités égyptiennes.

''Jews of Egypt'' retrace l'histoire de la communauté juive égyptienne, forcée de quitter le pays après la déclaration d'indépendance en 1948 et suite à la crise du Canal de Suez avec Israël en 1956. Le réalisateur s'est entretenu avec des juifs égyptiens exilés en Europe ainsi que les rares représentants de la communauté restés en Égypte. L'objectif était notamment de montrer qu'avant l'indépendance, la société égyptienne était beaucoup plus tolérante qu'actuellement où le mot juif à tendance à être systématiquement associé à ''sioniste'' ou ''ennemi''. Un reportage de Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami pour ARTE Journal.

                                                                          BONUS WEB

 

Nadia et Magda Haroun comptent parmi les dernières juives d'Egypte. Au Caire, elles ne sont plus que vingt femmes. Ces deux soeurs n'ont jamais eu l'intention de s'exiler aux États-Unis ou en Europe où se trouve une grande partie de leur famille. Elles travaillent comme avocates au Caire et se battent pour la survie de leur communauté, en particulier la préservation du patrimoine juif qui comprend notamment plus d'une vingtaine de synagogues, rien que dans la capitale égyptienne. Témoignage.

11 mars 2013

Jean-Luc Lavaud : l'arrivée des Islamistes au pouvoir n'a pas affecté les activités de l'Institut Français en Egypte

Jean-Luc Lavaud, conseiller culturel de l’ambassade de France en Egypte, a commencé sa carrière au ministère français de la Culture puis il a adhéré au ministère des affaires étrangères où il s’est occupé des questions de la culture et de la coopération au Vietnam, en Thaïlande, au Maroc et en Inde.  Avant d’être nommé Conseiller culturel en Egypte, il est passé par la direction de l’Orient et du Moyen-Orient au Quai d’Orsay.

Jean_Luc_Lavaud_1En tant que Conseiller culturel de l’ambassade de France au Caire, quelles sont les grandes lignes de votre stratégie dans le domaine culturel ?

Nos activités sont très variées. Bien sûr il y a la partie la plus visible de l’Institut Français qui consiste en des cours de langue et des activités culturelles pour le grand public. Mais l’Institut Français d’ Egypte c’est aussi le service de l’ambassade qui s’occupe de la coopération. C’est-à-dire qu’ici on s’occupe de la francophonie comme avec le Lycée Français et tous les établissements égyptiens qui ont la totalité ou une partie de leur programme en langue française. On s’occupe aussi de la coopération universitaire comme les filières françaises dans les universités égyptiennes et également de l’université française en Egypte. Nous nous occupons également de la coopération scientifique, comme avec le comité franco-égyptien « Imhotep » qui cofinance ce genre de coopération. Nous traitons également de questions de gouvernance à travers une coopération notamment avec le Conseil d’Etat égyptien et la Cour de cassation. Nous donnons des cours de Français à l’Académie de Police et à l’Institut Militaire des langues. Ce ne sont que des exemples pour dire que, globalement, notre travail est plus large que ce que l’on peut voir.

L’Egypte a changé et est en train de changer. Mon objectif, à notre petit niveau, est d’être là pour accompagner l’Egypte dans ces changements à travers nos activités. C’est-à-dire aider les Egyptiens à apprendre le Français ou à suivre les programmes français, continuer les activités universitaires, donner des bourses…etc. Et dans le secteur de gouvernance, essayer, en fonction des demandes, d’apporter notre expérience, plutôt que notre expertise, sur les sujets sur lesquels l’Egypte aujourd’hui réfléchit, comme par exemple la Constitution. Donc mon objectif c’est d’avoir des échanges avec les institutions qui le souhaitent sur tous les sujets. J’essaie aussi de me rapprocher le plus possible des jeunes en élargissant nos activités pour toucher des gens nouveaux qui ne venaient pas spontanément ici. C’est pourquoi nous essayons d’organiser le maximum des activités près du public. Et bien sûr, le but à long terme est de faire rayonner la culture française et les projets franco-égyptiens.

Les changements politiques en Egypte ont-ils mené à des changements dans la politique culturelle de l’Institut ? Sachant que le régime en France a changé en même temps...

Les changements en Egypte n’ont pas touché à nos activités. On fonctionne toujours pareil. Ce que je constate ici, c’est qu’il y a des gens qui prennent la parole alors qu’ils ne le faisaient pas avant. Il y a une libération de la parole qui est très désordonnée par ailleurs. Tous les sujets sont abordés, parfois bons parfois moins bons. Pour ce qui nous concerne, il y avait des thèmes que nous avions du mal à aborder avant et qui sont désormais possibles. Par exemple, l’Institut a organisé un cycle de conférences sur l’organisation de la société. Ce genre de conférences n’était pas possible avant.

Et l’arrivée des islamistes au pouvoir ?

Pour le moment, ils ne nous ont pas causé des problèmes. Au contraire, on aborde des sujets maintenant qu’on ne pouvait traiter avant. Mais ça peut arriver bien sûr. Aussi, il faut savoir que nous sommes très respectueux des coutumes et des pratiques du pays, nous n’allons pas organiser une activité qui provoque le peuple. Par exemple, en France nous sommes ouverts sur des sujets comme les droits de l’Homme, la laïcité, la peine de mort et la liberté d’expression, après dans la pratique, il faut respecter l’endroit où l’on est. On n’est pas là pour faire de la provocation. 

Jean_Luc_Lavaud_2L’Institut Français d’Egypte est l’un des plus grands dans le monde. Peut-on savoir son budget ? Y a-t-il eu une réduction ?

Nous ne communiquons pas le montant de notre budget mais je peux vous dire qu’il est de plusieurs millions d’euros malgré la baisse importante qu’il a subi en raison de la crise financière dont témoigne l’Europe, et la France en particulier, actuellement. Cette baisse n’a pas touché l’Institut seulement, mais tous les instituts français dans le monde. Elle s’est caractérisée ici par une réduction de notre effectif.

Vous coopérez avec l’Institut Français d’archéologie Orientale (IFAO) ?

Dans le cas de la coopération scientifique et universitaire, nous aidons des égyptologues. L’IFAO est l’une  des cinq écoles françaises à l’étranger qui sont des établissements de recherche français à l'étranger, placés sous la tutelle du ministère français de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Cela arrive que l’on organise des activités ensemble, mais ils ont leur propre budget. 

Il y a moins de produits culturels français exposés par le centre…Pourquoi ?

La raison réside dans le financement bien sûr. Faire venir un spectacle en Egypte cela coute très cher. On ne peut pas faire cela plusieurs fois dans l’année.  

Et dans le domaine du cinéma il y a une raison de plus : La révolution numérique. Avant, le ministère des affaires étrangères achetait des droits pour avoir les pellicules. Maintenant, on trouve de moins en moins de pellicules et, si on les trouve, le coût devient très élevé pour faire des copies.  J’espère que dans les quelques années qui viennent nous serons équipés d’un bon système numérique. J’espère aussi qu’on arrivera à passer les films français dans les cinémas égyptiens.

Les éditeurs égyptiens veulent traduire les œuvres français en arabe, mais ils ont des problèmes concernant les droits d’auteur, les éditeurs et la publication. L’Institut peut-il jouer le médiateur à cet égard ?

Nous jouons déjà ce rôle. Nous intervenons quelques fois même pour corriger la différence entre ce que l’éditeur français veut gagner et ce que son homologue égyptien peut payer. C’est très ennuyeux car effectivement il faut que les auteurs ou les éditeurs jouent le jeu... 

Demandez-vous l’avis des intellectuels égyptiens pendant la mise au point de votre plan culturel ?

La construction d’un programme n’est pas quelque chose qui se fait en un bloc. Nous ne nous mettons pas autour d’une table pour le faire, c’est plus compliqué que cela. Il faut savoir ce qui est possible de faire, qui sont les invités intéressés par venir. J’aimerais effectivement essayer de trouver un large panel d’Egyptiens avec lesquels on pourrait réfléchir aux attentes.

8 mars 2013

Les démons du stade

Depuis l'annonce de la condamnation à mort de 21 suporters de Port saïd, la colère va crescendo. Ce jugement rendu en janvier dernier visait les responsables de violences meurtrières après un match de foot contre le Caire.

Et le ressentiment vire à une remise en question du président Mohamed Morsi. Regulièrement les manifestations tournent au drame. Cette nuit encore un homme est mort au cours d'un affrontement avec la police. Et Le pire est à craindre pour demain, car un deuxième verdict doit être rendu dans la même affaire. Reportage de Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami.

TOUBOUL_EGYPTE_portsaid

 

11 février 2013

Deux ans après la révolution : la déception des paysans


Crise économique, chômage, départ des investisseurs étrangers, recours à la violence de la part du régime des Frères musulmans... Beaucoup de voix s’élèvent désormais contre le président. 

Mohamed Morsi a remporté les présidentielles de juin 2012 grâce à sa popularité dans les campagnes égyptiennes. Deux ans après qu’en est-il ? Est-il toujours aussi apprécié et quel est le quotidien des paysans ? Reportage pour la RTS Marion Touboul et Ahmed Hassan Sami

8 février 2013

Alaa al-Aswany : Le combat actuel se joue entre l’Egypte et les Islamistes

L'écrivain égyptien, célèbre pour son roman "L'Immeuble Yacoubian" (2002), a pris une part active dans la révolution de son pays en 2011. Il livre, sans détours, son analyse sur l'après Printemps arabe et les défis qui attendent l'Égypte. Entre optimisme et prudence.

 

AlaaVous aviez prévu l'explosion de la société égyptienne bien avant la révolution dans votre ouvrage "l'Immeuble Yacoubian". Que pensez-vous de ce qui se passe actuellement en Egypte?

 Une révolution signifie un changement profond non seulement au niveau politique mais aussi au niveau humain. Ce changement prend du temps. Je suis optimiste malgré la déception de constater la montée des islamistes et de leurs politiques fascistes, mais nous n’allons jamais reculer. L’Egypte ne sera plus jamais dirigée par un dictateur.

 Vous avez mentionné que l'Egypte traversait en ce moment la “troisième vague de la révolution”. Que voulez-vous dire par là?

 La révolution pour moi n’est pas un événement qui a une date précise. C’est un long processus qui sera achevé une fois que nous aurons obtenu les objectifs de la révolution. La première vague de la révolution égyptienne a été la chute du régime de Moubarak. La deuxième vague, c’est celle qui a fait chuter le Conseil Suprême des Forces Armées qui a dirigé le pays pendant 18 mois après Moubarak. La troisième vague a maintenant pour but de faire chuter les Frères Musulmans afin de construire un Etat civil.

 Faut-il que les Egyptiens renversent Mohamed Morsi comme ils l'ont fait avec Moubarak?

 Je suis contre le renversement du Président Mohamed Morsi qui a été élu démocratiquement. Ce n’est pas le but de la révolution. Mais il faut exercer des pressions pour que Morsi soit le président de tous les Egyptiens et non pas uniquement des Frères Musulmans. Depuis qu’il ait accédé au pouvoir, il s’est mis au dessus des lois, il n’en respecte aucunes.

 Pensez-vous que les Frères Musulmans ont appris les leçons des erreurs de Moubarak?

A mon avis, ils n’ont rien appris. Ils perdent chaque matin un peu plus la sympathie des Egyptiens. Si on regarde les résultats du référendum de mars 2011, on constate qu’ils étaient très populaires et écoutés dans la rue, alors qu’au référendum de décembre 2012, avec toutes les fraudes qu’ils ont organisées, presque 40 % des Egyptiens ont dit non.Ce qui est formidable, c’est de voir les Egyptiens, au bout de dix mois seulement, comprendre la différence entre les islamistes et l’islam, je pensais que cela aurait pris plus de temps.

 Est-ce que l'Egypte est en train d'être islamisée?

Impossible. L’Egypte est un pays qui possède 7000 ans d’histoire basée sur la tolérance que les islamistes ne peuvent pas effacer. En plus, l’Egypte est un Etat civil depuis le XIXe siècle.

 Comment voyez-vous le rôle et l'attitude de l'armée à l'égard de ce qui se passe ?

C’est très difficile de comprendre la position de l’armée. Il faut faire la différence entre l’armée, qui est loyale au peuple, et le Conseil Suprême des Forces Armées, qui, lui, a sûrement conclu des ententes avec les Frères Musulmans pour leur permettre d’accéder au pouvoir. Est-ce que l’armée peut faire un coup d’Etat ? C’est la grande question. Si c’est le cas, ce serait une catastrophe car cela signifierait l’échec de la révolution.

Vous étiez parmi les fondateurs du parti al-Dostour, en êtes-vous toujours un membre actif ?

C’est très compliqué. Je suis un écrivain et je veux rester libre de m’exprimer. Je refuse d’être membre d’un parti politique et je refuse d’avoir un poste dans n’importe quel gouvernement. Mon rôle dans le parti, c’est d’aider les dirigeants à établir une popularité dans la rue égyptienne. Alors on peut dire que je donne des conseils et quand le parti sera fort, je le quitterai définitivement.

YacoubianAl-Dostour se dit garant de la révolution et de l’Etat civil mais est critiqué pour son alliance avec les politiciens de l’ex-régime. Comment peut-il gagner la confiance des révolutionnaires?

Je comprends totalement ces critiques, mais il faut éclaircir deux points : premièrement Amr Moussa, l’ex-chef de la Ligue Arabe et ancien ministre des Affaires étrangères à l’époque de Moubarak, n’a jamais été corrompu. Deuxièmement, le combat actuel n’est plus entre révolutionnaires et anti-révolutionnaires. C’est un combat entre l’Egypte et les islamistes avec en première ligne les Frères Musulmans. Notre combat maintenant c’est de nous défendre, défendre la révolution et défendre le pays.

 Y a-t-il un plan frères musulmans de "liquider" leurs opposants?

Je ne sais pas, mais je peux dire que, personnellement, j’ai reçu deux menaces de mort depuis l’accession de Morsi au pouvoir. A mon avis, ils ne vont pas le faire maintenant, ce serait trop gros. Mais à long terme peut-être.

 Comment voyez-vous la nouvelle constitution?

Horrible. Les Frères Musulmans se sont emparés de la constitution. C’est eux qui ont choisi le comité chargé de la rédiger. Et ensuite ils ont fraudé le référendum sur l’adoption de la constitution. Cette dernière n’est absolument pas viable car elle ne représente que la pensée d’un seul courant politique en Egypte.

 Que pensez-vous du dernier remaniement ministériel ? Est-il en faveur de l’avenir de l’Egypte?

Ce remaniement prouve que les Frères Musulmans suivent les mêmes mesures que Moubarak lorsqu’il devait calmer le peuple : changer les têtes mais pas les politiques. La manière par laquelle les Frères musulmans voient les choses me fait penser au syndrome de Stockholm quand on se met à idéaliser son tortionnaire.

Comment voyez-vous les prochaines élections parlementaires?

Les Frères Musulmans savent qu’ils sont beaucoup moins populaires qu’avant. Pour cela, je pense qu’ils vont frauder les parlementaires. Mais les Egyptiens ne vont jamais accepter qu’on les trompe.

Comment voyez-vous l'avenir du printemps arabe avec la montée des islamistes?

 Il est normal que les islamistes soient sur le devant de la scène. Ils ont été opprimés et les peuples voulaient leur donner la chance. En plus, ils étaient la seule force organisée après la chute des régimes. Avec le temps, les peuples découvrent que les islamistes utilisent l’islam comme camouflage pour réaliser des intérêts politiques. Je suis sûr que les islamistes vont perdre à moyen terme. Et je suis sûr que la fin de l’islam politique, financé par l’argent du pétrole, commencera par le Caire.

 Que conseillez-vous aux jeunes pour réussir leur révolution?

 Mon seul conseil, c’est de ne pas accepter des compromis. Il faut que les jeunes continuent à exercer des pressions sur les politiciens afin qu’ils réalisent leurs ambitions. Depuis le 25 janvier 2011, toutes les bonnes décisions en Egypte ont été prises grâce aux pressions exercées par les jeunes dans la rue.

Article écrit pour le numéro 67 de la revue Le Courrier de l'Atlas (février 2013)

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